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Où sont les femmes ?

Henri Rivière 1902

ELLE domine Paris, on la présente souvent comme une grande Dame, son genre est féminin. ELLE, c'est la Tour Eiffel, symbole universel de la capitale française et de la nation. Paris accueillant les Jeux Olympiques en 2024, c'est sur son flanc qu'ont été fixés les anneaux qui célèbrent ce grand évènement sportif. 

Sous ces anneaux, des lettres capitales dorées, hautes de 60 centimètres sont assez grandes pour être vues du sol. Elles composent les 72 noms de savants mis à l'honneur par Gustave Eiffel. ILS mais pas ELLES.... 

Car force est de constater qu’aucune femme n’est mentionnée sur la grande structure métallique. Une petite révolution semble pourtant en marche grâce au projet ‘Hypatie pour la tour Eiffel’. Son comité œuvre pour inscrire 40 noms de femmes scientifiques au deuxième étage de la Tour, au-dessus des hommes …et des anneaux.  (*Hypatie était une mathématicienne et philosophe grecque (Alexandrie vers 370 - Alexandrie 415). Henri Rivière - 1902 -  Estampe - Série "Trente-six vues de la Tour Eiffel - Paris Musées Collections. 

Un détail à retrouver dans mon dernier livret des Traversées parisiennes : "Du quai de Passy au quartier du Gros-Caillou"Vente en ligne et sur les rayons de la librairie L'Esperluète à Chartres. 


Précieux vélins

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Parchemin très blanc, fin et souple, le vélin est un support de grande qualité qui permet de composer des dessins rehaussés d'aquarelle, particulièrement raffinés.

Entre 1793 et 1802, le peintre Nicolas Maréchal qui excellait dans cette pratique, compléta la collection des vélins du Muséum par des portraits de carnassiers à la fois sensibles et très singuliers.

Formé à l’étude de l’anatomie lors de ses études à l’École vétérinaire d’Alfort, Maréchal tente de représenter l'animal dans son milieu naturel. Travaillant essentiellement à partir des modèles vivants de la Ménagerie du Jardin des Plantes, il s'attachera aussi à donner à ses sujets des expressions presqu'humaines.

Imaginé debout sur le bord de la banquise, un ours blanc fixe la rive opposée et semble songeur face aux improbables statues qui s'y dressent. Mêlant réel et fantastique, cette très libre interprétation de l'animal invite à explorer le monde sauvage tout en rappelant que la frontière entre nature et imaginaire reste encore très floue à l'aube du 19e siècle. 

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Ours polaire, vélin conservé dans les collections du Muséum national d’Histoire naturelle - 1796 - Nicolas Maréchal © MNHN. Sujet développé lors du cycle Tout connaître de Paris 2024-2025. 

 


Un sac en or

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Voici une petite merveille qui possède une riche histoire, au propre comme au figuré.

Célèbre pour ses oeuvres abstraites couvertes d'or et d'argent, l'artiste colombienne Olga de Amaral a sublimé le sac Lady Dior en le recouvrant d'une nouvelle peau étincelante. Mais avant cette ultime métamorphose, l'accessoire mythique de la maison Dior avait déjà brillé de mille feux, porté par une personnalité tout aussi rayonnante.

1995, le couple présidentiel Chirac s’apprête à accueillir une invitée de marque : Lady Diana. Pour marquer cet évènement, Bernadette Chirac commande un sac à main exclusif à Dior. Reflet du savoir-faire exceptionnel de la maison, le petit modèle élaboré en cuir noir va s'inspirer d'un motif que Christian Dior affectionnait particulièrement, le cannage des chaises Napoléon III.

Offert à la princesse dès son arrivée à l’Élysée ; c’est le coup de foudre. Dès lors, Diana l'arborera à de nombreuses occasions, aussi bien en visite officielle qu’au quotidien. Moins de deux ans après sa commercialisation, les ventes de la maroquinerie Dior sont multipliées par dix. Bien que baptisé "Chouchou" à sa naissance, la fidélité de Lady Diana poussera la maison de l’avenue Montaigne à le rebaptiser  "Lady Dior". 

Fort de son succès qui ne s'est jamais démenti depuis, le sac est donc "revisité" en 1919 par plusieurs artistes femmes à la demande de Dior.  Délaissant le traditionnel motif cannage, Olga de Amaral introduit de nouvelles matières issues de son univers créatif - des carrés de toile de coton et lin brodés dorés à la feuille d’or - et transfigure l'objet en une moderne relique inca. 

La Fondation Cartier expose les oeuvres de l'artiste Olga de Amaral cet hiver à Paris. Une exposition présentée en cycle Expos+. 

 


Borghèse. Les fruits d'un péché

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Érigée au milieu d'un parc, véritable havre de fraicheur au cœur de la chaleur romaine, la Villa Borghèse enchante les visiteurs par la richesse de collections patiemment réunies par le cardinal Scipion Borghèse (1577-1633).

Décrit par ses contemporains comme curieux, courtois, voire timide, l'homme n'en fit pas moins preuve d'une avidité remarquable pour satisfaire sa passion pour l’art. À plusieurs reprises, il n'hésita pas à recourir à la menace afin de contraindre des artistes à lui céder des oeuvres ou à travailler pour lui. 

C'est une mésaventure de ce genre que cache l'œuvre célèbre du Caravage, le garçon à la corbeille de fruits. Cette peinture - l’une des premières acquisitions du cardinal Borghèse en 1607 - fait partie d'une expropriation bien connue subie par Giuseppe Cesari, autrefois maître du jeune Caravage.

Conservée par Cesari plusieurs années après le départ de Caravage de son atelier, accusé d’agression et de détention d’armes, le peintre fut forcé de la céder au pape Paul V. Lequel en fit don … à son neveu, Scipion Borghèse, commanditaire présumé de cette saisie.

La collection Borghèse, une histoire de famille (et de péchés véniels), s'expose au musée Jacquemart André, à Paris, jusqu'au mois de janvier. 

Garçon avec un panier de fruits - 1593-1595 - Michelangelo Merisi da Caravaggio dit Le Caravage - Collection Borghèse, Rome 

La beauté presque féminine du jeune homme à l'épaule dénudée fait écho de manière assez licencieuse aux promesses de volupté que dégagent les fruits. Ce jeune homme à la pose sensuelle n’est autre que Mario Minniti, lui-même artiste alors âgé de 16 ans, qui était aussi probablement l’amant de Caravage 

L'exposition de la collection Borghèse au musée Jacquemart André sera commentée en cycle Expos+.

 

 


Ribera. Ténèbres et lumières

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Dans le sillage du Caravage, Jusepe de Ribera, artiste espagnol installé en Italie, s’impose comme l’un des interprètes les plus fascinants de la peinture d’après nature. Artiste hors-pair par sa capacité à retranscrire une réalité presque tactile des chairs et des objets, il traduit avec une acuité bouleversante la dignité du quotidien et les drames humains.

D’une radicalité extrême, Ribera privilégie un réalisme cru et la violence des clairs obscurs. Sa peinture, à la fois brutale et poétique, propose une interprétation éminemment personnelle de la révolution du Caravage.

Ribera vécut de 1616 jusqu'à la fin de sa vie, à Naples. Au 19e siècle, les écrivains romantiques le considèrent comme le prototype du peintre anticlassique et propagent une image outrancière de son art. Lord Byron affirmait poétiquement que Ribera "trempait ses pinceaux dans le sang des saints". 

Les saints ermites constituent un sujet de prédilection pour Ribera qui représente saint Jérôme une quarantaine de fois. Dans cette version, l'ermite lève les bras en entendant la trompette du Jugement Dernier. Né en Vénétie en 347, saint Jérôme occupe une place importante dans la réforme de l’église catholique au 17e siècle. Sa traduction de la Bible en latin - connue sous le nom de Vulgate - fut déclarée traduction authentique par le concile de Trente en 1546.

L’épisode relaté par Ribera se distingue par sa mise en scène dramatique. Selon une technique héritée du caravagisme, le corps du vieil homme semble illuminé de manière presque surnaturelle sur la roche sombre sans que l'on puisse définir la source lumineuse. Quant à son air effrayé, il illustre l'un de ses écrits : « Que je veille ou que je dorme, je crois toujours entendre la trompette du Jugement. » 

Détail

St-Jérôme et l'ange de Dieu - 1626 - Jusepe de Ribera - Musée de Capodimonte, Naples. Le bras blanc et musclé de l'ange annonçant la parole divine souligne avec force la courbe de l'instrument. Cette apparition théâtrale fait écho à l'ange de saint Matthieu plein de vigueur, peint plusieurs années auparavant par le révolutionnaire Caravage, en l'église romaine de St-Louis-des-Français. 

L'exposition Ribera sera présentée au musée du Petit-Palais, à Paris à partir du mois d'octobre. A découvrir lors du cycle Expos+ en salle, à Chartres, saison 2024-2025