Previous month:
juillet 2024
Next month:
septembre 2024

L'Âge atomique. Les artistes à l'épreuve de l'Histoire

Charles
Le Musée d'Art Moderne de Paris propose de revisiter l’histoire de la modernité à travers l’imaginaire de l’atome.

À l’aube du 20ème siècle, les découvertes scientifiques sur la composition de l’atome et la radioactivité qui en émane bouleversent le rapport à la matière sur lequel repose la représentation artistique de la réalité.

La matière est désormais comprise comme énergie, ce qui permet d’imaginer un art affranchi de la pesanteur et de l’opacité des apparences de la nature.

L’invention de la bombe atomique et son utilisation destructrice contre le Japon par les États-Unis en août 1945 marquent un point de bascule de l’histoire moderne de l’atome, inaugurant un nouvel « Âge atomique ». Les artistes du monde occidental en proposent des lectures multiples : certains s’en tiennent à une neutralité esthète et à une fascination pour les mondes inconnus révélés par la physique, d’autres engagent une critique de la « spectacularisation » des explosions, d’autres encore tentent de représenter cette irruption du tragique au sein de la condition humaine.

Charles Bittinger’s “Late Stage of Baker” - 1946 - Navy Art collection, US.  L'explosion du « Baker » est un essai d'arme nucléaire mené par les américains sur l'atoll de Bikini, en Micronésie, le 25 juillet 1946. Le nuage extérieur, plus large, n'est en fait qu'un nuage de condensation. Il n'y a pas eu de nuage en forme de champignon classique s'élevant vers la stratosphère.

Mais, à l'intérieur de ce nuage de condensation, le sommet du geyser d'eau a formé une tête en forme de chou-fleur qui est retombée sur le lagon. L'eau libérée était hautement radioactive et a contaminé de nombreux navires installés à proximité.  Certains n'ont pas été endommagés et ont été décontaminés. Ceux qui n'ont pas pu être décontaminés ont été coulés à quelques kilomètres au large de San Francisco. A découvrir lors du cycle Expos 2024-2025, en salle ou en visioconférence.


Poils et peluches. De l'ours au nounours

20240125172918000000_b_02_bnf
Roi incontesté des jouets, l’ours en peluche s’invite au musée des Arts décoratifs à partir de décembre pour raconter son incroyable histoire. Né au tout début du 20e siècle, Teddy Bear dit Nounours de ce côté de l'Atlantique, s’est vite imposé dans le cœur des enfants, détrônant poupées et animaux à roulettes dont l’existence remonte pourtant à l’Antiquité.

Mais une question demeure :  comment l’ancien roi des animaux - vénéré pour sa force, craint pour sa férocité - a pu devenir le plus populaire des jouets, symbole universel de tendresse et de douceur ?

Venu du temps des cavernes, l'ours fut un temps le roi des animaux car de tout l’hémisphère nord, il est l’animal le plus fort. Du fait de sa capacité à se mettre debout, il sera même comparé à l’homme; une aberration pour le christianisme qui place l’homme au-dessus des animaux. Dès lors l'Eglise médiévale va lui déclarer la guerre, bien décidée à lutter contre les cultes ursins.

Des milliers d’ours sont massacrés tandis que se multiplient les récits hagiographiques où de saints personnages domptent l’ours, affirmant ainsi leur supériorité sur l'animal. Alors qu’il était admiré pour sa force, les théologiens lui attribuent  désormais plusieurs péchés capitaux. Incarnant la paresse, la colère, la gourmandise et la luxure, l’ours devient un animal de cirque ridiculisé sur scène ou dans les contes comme dans le célèbre Roman de Renart.

Pourtant malgré ce passé difficile, le roi déchu de nos forêts conserve une place indétrônable au palmarès des peluches d'hier et d'aujourd'hui.

Fleur de vertu - 1530 - Manuscrit François de Rohan - BnF. Colère de l'ours qui se fait attaquer par les abeilles lorsqu'il vole leur miel ; l'ours est le symbole de la gloutonnerie.  Cycle Expos+ en salle à Chartres, saison 2024-2025.

 

 

Fou d'amour

Aquamanile

Les fous d’hier sont-ils ceux d’aujourd’hui ? Le musée du Louvre consacre cet automne une exposition inédite à ces figures du fou qui foisonnent dans l’univers visuel du Moyen-Âge et de la Renaissance.

Au 13e siècle, le fou est inextricablement lié à l'amour et à sa mesure ou démesure, dans le domaine spirituel comme dans le domaine terrestre.

Le thème de la folie d'amour hante les romans de chevalerie et leurs nombreuses représentations. Une folie qui atteint jeunes et vieux. Ainsi, la scène du philosophe Aristote chevauché - et donc ridiculisé - par Phyllis, la maîtresse d’Alexandre, était fort en vogue à la fin du Moyen-Âge. Elle montrait avec humour le pouvoir des femmes renversant l’ordre habituel.

En voici le résumé : Aristote avait pour élève Alexandre le Grand et reprochait à ce dernier de se laisser déconcentrer de ses royales fonctions par Phyllis, courtisane dont il était éperdument amoureux. Obéissant à son professeur, Alexandre cessa donc de fréquenter la belle et s’en retourna traiter les affaires de l’État.

Vexée, Phyllis décide alors de se venger du vieux philosophe en usant de ses charmes.  Mais lorsque le sage succombe, la rusée courtisane lui explique que s’il veut la posséder, il devra d’abord accepter d'être sellé et bridé puis de se laisser chevaucher. L’éminent barbu accepte et voilà Phyllis se promenant à dos d’Aristote dans les jardins royaux, le fouettant pour le faire avancer.

Alexandre, témoin de cette scène, s'en amusera tout en reprochant à son maître de n’avoir point de raison et d’avoir cédé au jeu de la tentation. Contraint d’admettre qu’il n’a su résister à son désir, Aristote profitera tout de même de la situation pour donner la leçon à son pupille. La morale de cette folle envie ?  Si même le sage succombe, un jeune et fougueux roi doit donc redoubler d'attention pour échapper aux pièges de la séduction. 

Aquamanile - Metropolitan Museum of Art, NY    L’aquamanile est une sorte d’aiguière à usage religieux ou profane, qui servait à verser l’eau pour le lavage rituel des mains du prêtre avant la messe ou des convives avant un repas.

Quand le sage fait la bête

Sans doute conçu pour divertir la tablée dans un contexte domestique, cet aquamanile illustre la légende populaire et moralisatrice selon laquelle Aristote, philosophe grec, se laissa humilier par la séduisante Phyllis, en guise d’enseignement à l’adresse du jeune souverain Alexandre le Grand qui était son élève.  Une œuvre et une exposition à découvrir lors du cycle Expos+ 2024-2025

 


Le goût et le coût du café

Image_inconnu_cafe_des_incroy_g.4415_397858
Bien que très apprécié dans la haute société parisienne du 18e siècle, le café constitue une denrée rare et coûteuse car ses grains sont importés d'Arabie.

Suite à la paix d'Utrecht en 1714, un premier plant de caféier est donné à Louis XIV par le bourgmestre d’Amsterdam. Mais l'acclimatation de cette plante exotique s'avère difficile. 

La solution viendra du botaniste Antoine de Jussieu, auteur de la première description du caféier. On lui doit l'implantation d'une serre chaude au jardin royal parisien - futur Jardin des Plantes - qui favorisera le développement des plants. Bien abrités, ces derniers prospèreront suffisamment pour être exportés en Martinique puis dans les Antilles et en Guyane.

Si cette introduction doit beaucoup à Jussieu, elle est aussi très redevable à un personnage moins connu, Gabriel de Clieu. Chargé de veiller sur le caféier lors de la traversée vers les colonies françaises, il fut contraint d'utiliser sa chiche ration d'eau pour préserver le précieux plant.

L'histoire du premier plant de caféier sera développée lors du cycle Tout connaître de Paris 2024-2025

Café des Incroyables - 1797 - Auteur inconnu - Paris Musées Collections      Dix années séparent la chute de Robespierre du sacre de Napoléon. Elles ont été marquées par la soif de vivre, la frivolité, l’extravagance d’une jeunesse dorée avide de plaisirs, après la parenthèse sanglante de la Terreur. Très représentatifs de cette société, les Incroyables se distinguent par le raffinement excessif de leurs tenues, volontiers exhibées en se réunissant dans les cafés. Sur cette gravure, les Incroyables se distinguent par le port d'une curieuse coiffure dite en "oreilles de chien".  Café Les Incroyables


Chasseur devenu gibier

Sculpture
Commandées pour le décor du Muséum d'Histoire Naturelle à Paris en 1893, six sculptures en bronze devaient représenter des combats d’animaux. Professeur de dessin dans cette institution, Emmanuel Frémiet est l'auteur de plusieurs scènes associant singes et humains dont cet étonnant groupe installé à l'entrée de la galerie de Paléontologie.

Présentée sous forme d'esquisse dans un premier temps, cette lutte entre un homme et un orang-outan impressionna tant l'architecte du Museum qu'il décida de la faire réaliser en marbre.

Artiste de grand talent, Frémiet a souvent illustré l'affrontement entre l’homme et l'animal. Mais bien que doté d'armes et d'une pensée jugée très supérieure en cette fin de siècle, l'homme n'est pas toujours celui qui gagne la partie dans les oeuvres de cet artiste de renom. En outre Frémiet insiste sur la férocité de l'animal.

La cause en est une méconnaissance de l'époque sur les mœurs des grands singes. Car si cet imposant végétarien est capable de spectaculaires charges lorsqu'il se sent menacé, on le sait désormais plutôt paisible. Ce stéréotype de la férocité perdurera pourtant jusqu'au 20e siècle. Ainsi dans les années 30, Barnum n'hésitait pas à qualifier le gorille comme "la créature la plus terrifiante au monde".

Ici, le chasseur gît à côté de ses armes car il a clairement sous-estimé la puissance du singe protégeant son petit. Dominé par son gibier, il rend son dernier souffle, étranglé par la terrible poigne de l'animal tandis qu'un escargot poursuit tranquillement son chemin aux pieds de l'infortuné.

Orang-outan étranglant un sauvage de Bornéo - 1897 - MNHN, Paris. Sujet présenté en cycle Tout connaître de Paris 2024-2025

Frémiet - Copie


Canotage impressionniste

Skiffs_1985.64.6 (1)

Consacré sport olympique en 1894, l'aviron est une activité humaine ancestrale. À quelques centaines de mètres de l'un des sites des Jeux Olympiques de Paris, l'Arena-Bercy, plusieurs barques exhumées dans les années 1990 témoignent de l'ancienneté de cette pratique.

Mais le sport de l’aviron n’est pas une simple imitation du rowing, l’aviron anglais. Il doit beaucoup au canotage qui se développe à Paris dans les années 1830-1840. Les canotiers parisiens pratiquent alors autant la promenade que la course. Considéré comme l’un des premiers loisirs populaires, le canotage devient aussi l’un des premiers sports athlétiques et mécaniques.

Séduit par les effets de la peinture de plein air des impressionnistes, Caillebotte réalise plusieurs scènes de canotage au tournant des années 1870-1880. La thématique se révèle particulièrement séduisante pour le peintre qui pratique lui-même l’aviron et se passionne pour les sports nautiques importés d’Angleterre. Une pratique qui sera facilitée par son acquisition d'une propriété en bord de Seine en 1881 ; située au Petit-Gennevilliers, elle se trouvait face à Argenteuil, haut lieu de yachting.

Périssoires - 1878 - G. Caillebotte - © National Gallery of Art, Washington  « Histoire des JO façon ART’Hist ; l’essentiel étant aussi de regarder 😊 »

Saison ART'Hist  2024-2025 : les pirogues de Bercy seront au programme du cycle Tout connaître de Paris et une grande exposition du musée d'Orsay mettra le peintre Caillebotte à l'honneur cet automne.