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Escapade automnale

Millet Automne Pt ft
Puisque la douceur des derniers jours de septembre incite à la promenade, voici une escapade artistique autour de trois monumentales meules de foin peintes par Jean-François Millet (1814–1875), auteur de L'Angélus, chef-d'œuvre de l'École de Barbizon.

Commandé en 1868 par l'industriel Frédéric Hartmann, ce beau tableau évoquant l'automne est issu d'une série représentant les quatre saisons. En dépit de son intérêt pour cette commande, Millet y travailla par intermittence pendant les sept années suivantes.  Exécutée en 1874 cette toile est caractéristique du style des dernières années de Millet. Sa touche plus lâche révèle ici la couleur du fond rose, délibérément exposée. Il travaille aussi davantage les jeux de lumière et la luminosité de ses tableaux, autant de signes annonciateurs de l'Impressionnisme.

Millet meurt en 1875 - peu après la naissance officielle du mouvement - sans achever la dernière toile de la série, L'Hiver.                    À l'automne - J.-F. Millet - 1874 - Metropolitan m. NY

L'automne annonce la reprise des cycles ART'Hist. Reprise des séances en salle ou en visioconférence début octobre. 

 


Mme Swann se promenait dans l'avenue du Bois comme dans l'allée d'un jardin

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[...] Ce qui augmentait cette impression que Mme Swann se promenait dans l'avenue du Bois comme dans l'allée d'un jardin à elle, c'était – pour ces gens qui ignoraient ses habitudes de « footing » – qu'elle fût venue à pied, sans voiture qui suivît, elle que dès le mois de mai, on avait l'habitude de voir passer avec l'attelage le plus soigné, la livrée la mieux tenue de Paris, mollement et majestueusement assise comme une déesse, dans le tiède plein air d'une immense victoria à huit ressorts.

À pied, Mme Swann avait l'air, surtout avec sa démarche que ralentissait la chaleur, d'avoir cédé à une curiosité, de commettre une élégante infraction aux règles du protocole, comme ces souverains qui sans consulter personne, accompagnés par l'admiration un peu scandalisée d'une suite qui n'ose formuler une critique, sortent de leur loge pendant un gala et visitent le foyer en se mêlant pendant quelques instants aux autres spectateurs. [...]  Marcel Proust - À l'ombre des jeunes filles en fleurs

Marcel Proust voit souvent le monde en tableaux et nous incite à retrouver dans l'art le miroir de ses descriptions. Témoin sensible de l'effervescence d'une capitale à la pointe de l'élégance, le peintre berlinois Franz Skarbina (1849-1910) visite Paris à la fin du 19e siècle et illustre des scènes de la vie urbaine sous l'influence des impressionnistes. Bien que peinte dans le parc du château de Sans-Souci, cette élégante gouache semble faire écho au texte de Proust.  

Le dernier livret des Promenades ART'Hist vous guidera sur les traces de Proust à Paris et à Illiers-Combray. Promenade dans un parc - Franz Skarbina - 1885 - NGA, Washington


Grains divins et parisiens

J Decker NGAW
À Paris, la culture de la vigne se développe à la fin de l'antiquité romaine. Au moment de la chute de l'Empire, le vignoble, déjà important, passe sous le contrôle monastique. Mais les collines avoisinantes plantées en vignes sont aussi exploitées par des seigneurs ou des bourgeois : à Montmartre bien sûr, ainsi qu'à Belleville où se trouve le clos de Savies avec ses 15 hectares de cépages. On y cultive le fromenteau et le morillon dont parle le poète Villon pour le vin de messe.

Époque "bénie" car les vins parisiens sont alors réputés. Boisson, ingrédient de cuisine, le vin est aussi l'objet de prescriptions médicales (fumigation, gargarisme, onction ...) De plus, sa consommation se fait en grandes quantités puisqu'on le préfère à l'eau de la Seine, souvent polluée. À sa façon, le calendrier guide la consommation du divin nectar : vins clairs et légers en été, vins forts en hiver, vins blancs doux jugés plus nourrissants par temps de brouillard.

Puis avec l'augmentation de la ville au 14e siècle - et donc de la demande - une viticulture populaire implante un cépage grossier au rendement important, le « gouais », cultivé sur de minuscules parcelles. Au 18e siècle, le vignoble parisien a donc perdu ses nobles cépages au profit d'une production abondante mais médiocre. Voici venu le temps du guinguet, vin aigrelet produit et consommé localement dans les guinguettes. Grappes de raisin - J. Decker - National Gallery of Art, WDC

Ce sujet et le tableau ci-dessus seront développés en cycle Tout connaître de Paris, saison 2022-2023.

 

 

 

 


Un dimanche à Venise ou Combray ?

Ziem AIC
Dans "Albertine disparue", Proust n'hésite pas à mettre sur un pied d'égalité l'illustre cité italienne et le modeste bourg :
"Ma mère m’avait emmené passer quelques semaines à Venise et — comme il peut y avoir de la beauté, aussi bien que dans les choses les plus humbles, dans les plus précieuses — j’y goûtais des impressions analogues à celles que j’avais si souvent ressenties autrefois à Combray, mais transposées selon un mode entièrement différent et plus riche."
Proust rapproche le soleil matinal qu’il a vu auparavant dans le petit bourg et celui de Venise. Car pour l'écrivain amateur de cette incroyable madeleine dégustée un dimanche matin à Combray, la beauté peut se révéler dans toutes les choses, si humbles soient-elles.
 
Je vous souhaite un bon dimanche, et à défaut de vous rendre sur les bords de la lagune, le dernier livret des Promenades ART'Hist vous permettra de suivre les traces du petit Marcel à Illiers-Combray. Vers 1890 - Félix Ziem (1821-1911) - Chicago

La fin des bulles

Couture Thomas - Copie
Voici venu septembre et sa cohorte d'écoliers. Certains pressés de retrouver maître et pupitre, d'autres moins enthousiastes à l'idée de renouer avec l'étude et ses obligations.

Ils se retrouveront peut-être dans cet enfant qui rêve devant des bulles de savon, symboles traditionnels de la fugacité de la vie. Une couronne de laurier fanée sur le mur suggère la nature éphémère des louanges et des honneurs. Le mot "immortalité", inscrit sur le papier inséré dans le miroir, renforce le contenu allégorique du tableau. Le peintre Thomas Couture était un enseignant influent connu pour son opposition à un enseignement académique strict.

Quant au verbe buller, il trouve son origine dans l’armée française. Les artilleurs devaient régler les niveaux à bulle de certains engins militaires, et une fois la bulle « coincée » entre les deux repères, il ne leur restait plus qu’à patienter jusqu’au signal. C’est de là que provient l’expression « coincer la bulle », qui signifie « ne rien faire, attendre que le temps passe », d’où, par raccourci, le terme « buller »  Des bulles de savon - 1859 - Thomas Couture - Metropolitan museum, NY

La rentrée des cycles ART'Hist est programmée début octobre. Il y aura du rêve et des bulles mais ce sera sans mélancolie ! Pour obtenir le programme détaillé, il suffit d'en faire la demande par mail à [email protected] ou par téléphone au 06 60 67 53 66.