Scandaleuses Etrusques! Vertueuses Grecques!
C'est un fait bien connu: la calomnie n'a pas d'âge. Aujourd'hui, étalée avec complaisance sur les pages des magazines comme au fil de nos navigations plus ou moins fructueuses sur le net, bien vivante, repue de grasses rumeurs et de verts détails. Hier, arme vénéneuse du vénérable Aristote lorsqu'il écrit sur les coutumes étrusques: "Les Tyrrhènes (les étrusques) dînent en compagnie de leur femme, couchés sous le même manteau." Mais il est probable que la phrase aristotélicienne ne suffisait pas à nourrir l'imagination des détracteurs des étrusques. Alors le fait prend de plus amples proportions, plus croustillantes chez un contemporain d'Aristote, l'historien Théopompe. "Elles festoient avec n'importe quel homme présent" mais assure-t'il, ces dames n'hésitent pas à s'enivrer et surtout, ne se contentent pas des seuls plaisirs de la table aux cotés de leurs compagnons......
Est-ce assez clair ou souhaitez-vous quelques précisions supplémentaires?
Rassurez-vous, il n'est pas question de nous égarer plus avant sur un chemin aussi tortueux. Revenons à nos moutons car ce ne sont là que pures calomnies dans le pire des cas et plus souvent la marque d'une incompréhension des moeurs étrusques.
Peinture murale d'un tombeau dans la nécropole de Tarquinia
Très impliqués dans les trafics commerciaux qui parcourent la Méditerranée, dominant les autres peuples italiques, les étrusques connaissent une expansion remarquable au VIe siècle qui engendre un mode de vie trop raffiné aux yeux des grecs. Le principal grief dont feront usage les hellènes lorsqu'ils critiqueront les étrusques est la truphè, c'est-à-dire leur voluptueuse mollesse. Le désormais légendaire laisser-aller toscan est repris chez Diodore: la participation des Etrusques à des banquets deux fois par jour, l'usage d'une vaisselle luxueuse en métal précieux, une très nombreuse domesticité, leur goût pour les tissus ornés de fleurs...
Autant de détails visibles sur les peintures qui ornent les parois des tombes, on ne saurait donc nier leur goût pour les banquets et la richesse des objets de luxe découverts au gré des fouilles. Mais les moeurs dépravées n'ont guère de fondement réel et la place particulière donnée à la femme dans la société étrusque confirme en fait le rôle de premier plan qu'elle y occupe.
Chez les grecs les femmes respectables, confinées dans le gynécée, ne participaient pas aux banquets. Seules les courtisanes y étaient admises. La femme étrusque, en revanche, y prend place aux cotés de son époux car elle sort beaucoup, assiste aux spectacles, aux courses de char et constitue de ce fait un véritable contre-exemple peu conforme à l'idéal féminin des grecs et des romains.Cette singularité suffira pour déclencher l'ire des adversaires du monde étrusque.