Lectures silencieuses
Rouge-gorge, rouge-sang

Sur le banc des Proust

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Le jeune Marcel Proust et sa famille viennent à Illiers pour les fêtes de Pâques. Pays natal d'Adrien, médecin renommé et père du futur écrivain, ce bourg beauceron apparait alors bien éloigné du monde parisien. 
 
Mais c'est un autre fossé qui sépare son épouse Jeanne, israélite cultivée née Weil, de sa mère Virginie Proust, épicière et veuve, dont les seules distractions sont la messe et confesse. Jeanne partage avec elle le banc fermé que le curé leur loue à l'année. Adrien n'accompagne pas sa femme à l'église ; il jouit du privilège masculin qui permet de s'abstenir... Mais on ne comprendrait pas que son épouse n'assiste pas à la messe.
 
En vérité, Jeanne est assez indifférente à la religion et ne fait qu'assumer ce qu'elle considère comme ses devoirs de mère et d'épouse ou plus exactement une obligation sociale. Car, convaincus que l'alliance avec un catholique favoriserait son intégration dans la société française de l'époque, ce sont ses parents qui ont favorisé son union avec ce médecin promis à un brillant avenir. De plus, Adrien n'hésitait pas à revendiquer sa conscience de libre-penseur et Jeanne n'eut pas à se convertir. 
 
On se plait cependant à imaginer que lorsque la mère de Marcel Proust suivait la messe, elle surveillait attentivement les gestes de sa belle-mère pour ne pas se tromper dans la succession des agenouillements et des signes de croix propres à l'exercice du rite. 
 
Voûte peinte de l'église St-Jacques d'Illiers-Combray © Anne Chevée