LA FOLIE AUX PORTES DU GÉNIE
Certains parlent, d'autres préfèrent peindre ou modeler.
La création artistique est une forme d'expression parmi d'autres; un lien physique tissé vers la société. Mais pour quelques artistes cet échange semble parfois difficile à ordonner. Le créateur butte, en proie à une imagination si fertile et si débridée qu'elle semble friser avec la démence. Ainsi Camille Claudel qui, avant d'atteindre les frontières de la folie, déploya l'étendue de son talent en inventant des images au fort contenu symbolique comme L'âge mûr.
Plus d'un siècle avant Mademoiselle Claudel, un homme avait lui aussi exprimé les tourments de son âme dans des créations plastiques extraordinaires. Franz Xaver Messerschmidt, portraitiste reconnu fut écarté de la cour viennoise pour cause de troubles mentaux. Animé, comme Camille, d'un délire de persécution, il ressentit douloureusement le tort qui lui était fait. Conscient de son état et cherchant un moyen de combattre les fantômes qui le hantaient, il fit de son métier un exutoire au mal, reproduisant inlassablement les mimiques grimaçantes de son visage sous l'emprise de l'angoisse.
Rictus sardonique, moue désabusée, bouche béante ou cadenassée par une bande, une cinquantaine de têtes virent le jour sous les doigts fébriles de Messerschmidt entre 1771 et 1783.
Quelle que soit l'interprétation de ces têtes d'expression, elles s'inscrivent clairement dans le débat qui tente de justifier le génie et son moteur ; l'inspiration. A la fin du 18e siècle et au siècle suivant, plusieurs scientifiques et pseudo-scientifiques tenteront d'associer les maladies de l'âme aux manifestations éclatantes de certains génies artistiques.
Car Diderot l'écrivait déjà : "(...) le génie et la folie se touchent bien près !"
Visite commentée de l'exposition du Musée du Louvre : jeudi 17 mars 2011 à 11h30. Voir la rubrique Visites guidées.
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